Giacinto Scelsi(La Spezia 1905 – Rome 1988)
Issu de la noblesse italienne, il reçoit une éducation particulière qu'il qualifia lui-même de médiévale. Il suit des cours particuliers de Giacinto Sallustio à Rome puis de Walter Klein, élève de Schoenberg, à Vienne. Il s'intéresse également aux théories de Scriabine. La création en 1931 de
Rotativa sous la direction de Pierre Monteux à la Salle Pleyel attire l'attention sur le jeune compositeur. De retour à Rome en 1937, il organise avec ses fonds propres des concerts de musique contemporaine en collaboration avec le compositeur Goffredo Petrassi : on y donne des œuvres de Stravinsky, Kodaly, Chostakovitch, Schoenberg, Hindemith.
En 1940, il se réfugie en Suisse, où il épouse Dorothy-Kate Ramdsen. Il traverse à la fin des années 40 une grande crise morale où il remet en question toutes ses compositions antérieures. Il supporte mal la création de son quatuor à cordes et de son oratorio La naissance du verbe à Paris en 1949. Interné en hôpital psychiatrique, il ne joue au piano qu'une seule note (un la bémol) dont il explore toutes les possibilités sonores avec les harmoniques provoquées par les vibrations. Il se rend sur Paris et fait éditer par Guy Levis Mano ses recueils de poésie, et fait la connaissance d'Henri Michaux, avec qui il se lie d'amitié.
Il fait alors plusieurs voyages en Orient où il en découvre la spiritualité. Il se procure un des premiers instruments électroniques, l'ondioline, qui permet de faire des intervalles inférieurs au demi-ton. Incapable physiquement et psychologiquement de transcrire ses improvisations, il les enregistre sur bande magnétique et les confie à des copistes. Scelsi détruisit toutes ses œuvres antérieures qu’il considère trop académiques. En 1961, Maurice Le Roux crée ses
Quattro pezzi su una nota sola, œuvre pour orchestre en quatre mouvements, chacun fondé sur une seule note, contemporaine d'
Atmosphère (György Ligeti) qui exploite la microtonalité et la micropolyphonie.
Imprégné de culture orientale, Scelsi se voulait avant tout un messager, « un facteur » selon ses termes, le message venant de plus haut.
Son œuvre et sa pensée musicale ont eu une grande influence sur les musiciens fondateurs de l'Itinéraire : Tristan Murail, Gérard Grisey, Michaël Levinas. De nombreux compositeurs ont été ensuite influencés par sa pensée ou son écriture : Kaija Saariaho, Solange Ancona...
Il a écrit plus de 150 pièces. Ses œuvres les plus marquantes sont postérieures à 1950. Elles privilégient le son, souvent monodique, ou sous forme de cluster instrumental ou vocal, en jouant sur les micro-intervalles ou les articulations. C'est d'abord pour instrument seul que ses nouvelles idées prennent forme au cours des années 50, en s'élargissant à de petites formations en musique de chambre ; il délaisse petit à petit son instrument de prédilection jusqu'alors, le piano, peu approprié pour ses nouvelles recherches qui demandaient d'entretenir le son et de modifier son timbre. Les
Quattro pezzi su una nota sola (1959) sont la forme la plus aboutie que prend cette nouvelle conception de la musique et du son prend. Chacune de ces quatre pièces est basée sur une unique note jouée par un orchestre de chambre. Aion, quatre épisodes de la vie de Brahma (1961), et
Konx-Om-Pax 1968 (trois mots qui signifient chacun « paix », en assyrien, en sanskrit et en latin) sont d’inspiration orientale. Ses œuvres orchestrales de la maturité ont recours aux cuivres et aux percussion, même si les cordes conservent un rôle important.
Giacinto Scelsi travaillait beaucoup avec les musiciens qui interprétaient ses œuvres, notamment citer Michiko Hirayama (voix), Joëlle Léandre (contrebasse) ou Frances Marie Uitti (violoncelle).