Ange Politien Angelo Ambrogini ou Agnolo Poliziano (Montepulciano, Sienne, 1454 - Florence 1494), dit Politien en français d’après sa ville d'origine (Mons Politianus). Il reçut sa formation dans l'atmosphère humaniste de Florence. À seize ans, il commença à traduire l'Iliade d'Homère en hexamètres latins. L'élégance de sa traduction provoqua l'admiration de ses contemporains.
Il entre, en 1473, au service de Laurent le Magnifique qui lui confie plusieurs charges ecclésiastiques. Politien devient son ami et le précepteur de ses fils Pierre et Jean, le futur pape Léon X. Les années 1470 à 1480 sont celles de l'apogée de sa production poétique, il compose de nombreux poèmes.
Après la conjuration des Pazzi dirigée contre les Médicis en 1478, Politien quitte Florence pour Ravenne, Venise, puis Mantoue auprès du Cardinal Gonzaga, où il compose Orphée en 1480. Il revint ensuite à Florence, où, après s'être réconcilié avec Laurent, il retrouve sa charge de précepteur et reçoit la chaire de rhétorique latine et grecque à l'université de Florence.
ŒuvresPolitien fut le meilleur humaniste dans le domaine de l'écriture en langue vulgaire qu'il employa dans des compositions variées : chansons, ballades, montrant son attachement aux thèmes populaires. Il fut aussi le poète du mythe, de la vision, de la nature, de la jeunesse sereine, où s'insère douloureusement la mort. Le poète élégant qui recréait les mythes de l'Antiquité dans une atmosphère onirique était également un connaisseur érudit de la littérature classique. On peut le considérer comme le fondateur de la philologie moderne.
Les Stances pour la joute de Julien de Médicis furent écrites entre 1475 et 1478, pour célébrer la joute au cours de laquelle triompha Julien de Médicis, frère de Laurent. Il représente la beauté dans des descriptions mythologiques qui viennent de sa profonde culture humaniste. Idylle, amour et mythologie sont les trois éléments principaux des Stances. Les Stances sont donc une célébration de l'amour entendu comme apaisement et harmonie. L'élément idyllique se retrouve dans la description de la nature. A travers l'histoire de Julien, c'est bien sûr toute la famille Médicis qui est célébrée.
Orphée (en italien : La favola d'Orfeo) est une pièce de théâtre écrite en 1480 à l'occasion des noces de François de Gonzague et d'Isabelle d'Este. L'œuvre fut composée en deux jours de géniale improvisation. Le thème lui fut suggéré par les versions classiques du mythe et en particulier celles d'Ovide et de Virgile : le poète mythique Orphée descend dans les Enfers pour ramener sur terre sa femme Eurydice, morte après avoir été mordue par un serpent en fuyant un berger amoureux d'elle. Emus par le chant d'Orphée, les dieux lui permettent de descendre aux enfers pour aller chercher Eurydice, à condition de ne pas la regarder avant d'être remonté à la surface de la terre. Orphée va malgré lui transgresser cet interdit et il va perdre Eurydice à jamais à l'instant même où il croyait l'avoir sauvée. Revenu seul des enfers, il va se réfugier dans une féroce solitude. En refusant le commerce des femmes, il provoque la colère des disciples de Bacchus qui, en proie à une violente folie meurtrière, le mettent à mort.
Avant cette œuvre, les seules pièces en italien sont les sacre rappresentazioni (connues dans toute l'Europe sous le nom de mystères) dont les thèmes sont généralement religieux.
La favola di Orfeo est donc la première pièce qui soit véritablement d'argument profane, d'où son importance littéraire.
Orphée suit le schéma des mystères. Dans les mystères c'est traditionnellement un ange qui fait la présentation de l'histoire, ici ce rôle est tenu par Mercure. La linéarité temporelle que l'on retrouve notamment à travers l'organisation sous forme de tableaux successifs. Le mouvement dramatique assez lâche. La première partie se compose d'une dialogue entre deux bergers, le jeune Aristée et le vieux Mopsus. Aristée raconte son amour malheureux pour Eurydice et chante une chanson pour apaiser son tourment. Dans le fond, apparaît Eurydice. La seconde partie décrit la descente d'Orphée aux Enfers et la perte définitive d'Eurydice. La fable d'Orphée présente, dès le début, un monde où le vrai drame n'existe pas : la lamentation et la passion d'Aristée se désagrègent dans la musique de ses vers, et la douleur d'Orphée ne se manifeste pas par une plainte, mais par un chant.
Praelectiones
Politien écrivit des introductions aux Silves de Stace, sur l'Institution oratoire de Quintilien, sur Perse et sur Suétone.
Les très érudites Sylvæ sont des introductions où le poète fait preuve de sa culture et de sa finesse de poète latin.
Introductions latines en prose
1.Dialectica (1493) : introduction à un cours sur la philosophie aristotélicienne
2.Lamia (1492) : contre ceux qui lui avaient reproché son intérêt tardif pour la philosophie.
Élégies latines
1.Élégie sur la mort d'Albiera - Albiera des Albizi, très belle jeune fille, mourut en 1473. Le poète pleure sa mort et chante sa beauté. L'élégie est dédiée à Sigismondo Della Stufa dont Albiera était la fiancée.
2.Lalagen célèbre la beauté féminine.
3.Dans Violas, la passion pour la dame devient amour pour la nature fleurie.
Miscellanea (1489)
C'est dans cette œuvre que l'on voit apparaître le Politien philologue. Les Miscellanea traitent divers sujets : interprétation de textes classiques, correction d'erreurs dans l'édition du texte, histoire de manuscrits antiques. Ce sont les principes qui guident son travail qui font de lui le père de la philologie moderne.