Engelbert Dollfuß est Chancelier fédéral de l'Autriche du 20 mai 1932 au 25 juillet 1934, ainsi que dictateur à partir du 4 mars 1933.
Une enfance très pieuse
Né à Texing (Basse-Autriche), le 4 octobre 1892, Engelbert Dollfuß est le fils naturel de Josepha Dollfuß. Issu d’une famille de paysans catholiques très croyants, il envisagea de devenir prêtre. Mais il abandonne ce projet lorsqu’il entre en 1913, à l’université de Vienne où il étudie le droit.
Un courageux combattant
L’année suivante, la Première Guerre mondiale éclate. Dollfuß s’engage dans l’armée mais est réformé à cause de sa petite taille de 1m51 qui lui valut plus tard le surnom de « Millimeternich ». Profondément vexé, il s’engage comme volontaire et, cette fois-ci, est mobilisé. C’est ainsi que Dollfuß part combattre glorieusement les Italiens, gagnant ses galons d’aspirant, puis de lieutenant. En 1918, il est fait prisonnier, mais est rapidement libéré.
La guerre finie, il rentre dans un pays détruit et ruiné.
Un conservateur « agricole »
En août 1919, Dollfuß alors doté d’un doctorat en droit, devient secrétaire d’une coopérative agricole.
Une des premières missions qui lui est confiée, est d’inciter à la création de syndicats agricoles. Il voyage ainsi en Allemagne où il fait la rencontre d’une riche paysanne protestante, Alwine Glienke, sa future femme.
Promu en 1922, président de la Caisse d'assurance agricole, il se lance dans la politique en tant que membre du parti conservateur « social-chrétien ». Ses idées, conservatrices et nationalistes, préconisent un État autoritaire « corporatif et chrétien » où l’indépendance de l’Autriche ne serait pas remise en cause.
Travailleur efficace, Dollfuß est élu en 1927, président de la Chambre d'agriculture de la Basse-Autriche et est nommé en 1931, Ministre de l’agriculture. À la même époque, il fut désigné comme successeur « spirituel » de Mgr Seipel, le chef du parti.
Le nouveau chancelier
Le 20 mai 1932, le Président autrichien Miklas, appelle Dollfuß au poste de chancelier. Cette nomination surgit à un moment critique pour la jeune république autrichienne. Celle-ci, touchée de plein fouet par la crise de 1929, doit aussi faire face aux querelles politiques qui opposent marxistes et chrétiens. Mais Dollfuß est bien décidé à suivre la politique de son prédécesseur Ignaz Seipel. Bien que son parti ne dispose que d’une voix de majorité au parlement, Dollfuß refuse toute coalition avec les sociaux-démocrates.
Décidé à redresser la situation du pays, il se lance, non sans difficulté, dans le rétablissement de l’équilibre financier, à la stabilisation du schilling et à la réorganisation du Creditanstalt, une des principales banques autrichiennes.
Un antinazi
Le 30 janvier 1933, Hitler est nommé chancelier. Cet événement marque le début du combat que vont se mener le parti nazi autrichien et Dollfuß ; l’un voulant l’Anschluss, l’autre le combattant fermement. Conscient de la puissance de son adversaire, Dollfuß essaie de trouver rapidement des alliés : à l’extérieur, Mussolini se révèle être un protecteur. Mais à l’intérieur, le chancelier tente vainement de créer un gouvernement de coalition avec les sociaux-démocrates. C'est l'échec. Ces derniers refusent tout compromis et exigent de nouvelles élections. Dollfuß refuse à son tour.
Le parlement lui offre alors l'ultime solution, l’auto-dissolution.
La dictature
Le 4 mars 1933, le président et les deux vice-présidents du parlement démissionnent. Le rêve d’Engelbert Dollfuß se réalise enfin : l’Autriche devient un État autoritaire, corporatif et catholique. Il ne gouverne désormais que par décret ; ce pouvoir dictatorial lui permet de supprimer le droit de grève et de réunion ainsi que les cours d'assises, et d’interdire la presse prolétarienne. Commence alors ce que les historiens ont par la suite appelé l'austrofascisme.
Le 30 mai 1933, le parti communiste est dissous et le 20 juin 1933, le parti nazi interdit. Ses nombreux membres actifs sont arrêtés et placés dans des camps de concentration. La riposte de Berlin ne tarda pas : la radio allemande le discrédita, se servant de son père inconnu pour l’accuser d’être un « demi-juif ».
Il devient la cible à abattre pour les nazis autrichiens.
Une répression sanglante
Dollfuß bien qu’antinazi, n’en est pas moins fasciste. Il fonde une ligue d’extrême droite, le Front Patriotique, futur parti unique.
Les tensions politiques en Autriche s'accentuent de plus en plus. Le 3 octobre 1933, le chancelier Dollfuß échappe de peu à un attentat perpétré par les nazis. Et le 19 janvier 1934, les socialistes, dernier parti légal de l’opposition, appellent à une grève générale et pacifique. Dollfuß réplique en arrêtant plus de 200 sociaux-démocrates, dont la plupart détenaient des postes clefs dans l'administration. Ces derniers restent néanmoins sur leur position pacifique et essaient de négocier. Mais les ouvriers, exaspérés, déclenchent une guerre civile le 12 février. Les affrontements entre civils armés et forces de police sont un carnage : on décompte environ 1500 à 2000 morts et près de 5000 blessés. Le 16 février l’insurrection est matée et le chancelier interdit le parti socialiste.
Seul au pouvoir
Dollfuß se retrouve seul maître au pouvoir. Mais à quel prix ? Le pays est en partie détruit ; et désormais vu comme un dictateur sanguinaire, il perd petit à petit ses soutiens internationaux. De plus, les socialistes, un des derniers remparts contre le nazisme, sont évincés.
En revanche, il profite de la situation pour mettre officiellement en place, le 1er mai 1934, sa nouvelle constitution : l’Autriche cesse d’être une République et devient un « État corporatif » et autoritaire, où des élections auraient lieu « quand les circonstances le permettront ».
L’échec du coup d’État
La mort de Dollfuß annoncée en première page du journal Das Kleine Volksblatt le 26 juillet 1934. Dollfuß essaie un dernier rapprochement avec les sociaux-démocrates le 11 juillet 1934, se débarrassant de son très impopulaire Ministre de l’Intérieur, Émile Fey. Mais rien n’y fait, la situation continue à se dégrader… Son dernier soutien est alors Mussolini, qui au grand regret d’Hitler, ne partage pas les mêmes idées sur l’Autriche.
Le 25 juillet 1934, des nazis autrichiens, déguisés en uniforme militaire, prévoient de prendre en otage le conseil des ministres, le président Miklas, ainsi que les principaux médias du pays. Mais le complot échoue grâce à l’intervention de Fey qui prévient à temps Dollfuß. Celui-ci tente alors de s’enfuir de la chancellerie, mais surpris par les nazis, il est grièvement blessé et meurt dans la journée de ses blessures. Profondément choquée par cet assassinat, l’opinion publique le voit, depuis cet événement, comme un héros ayant combattu fermement le nazisme.
Schuschnigg, lui succède à la chancellerie et poursuit son œuvre jusqu'à ce que l'Anschluss mette un terme à cette politique.