Carl ORFF est né en 1895 d’une famille issue de la grande bourgeoisie de Munich. Fils d’un père officier (tradition familiale semble t-il), mélomane à ses heures et d’une mère pianiste. En 1900 il commence à prendre des cours de piano auxquels vont s’ajouter ceux d’orgues et de violoncelle.
A l’âge de 10 ans il compose des textes et des musiques pour ses propres théâtres de marionnettes. Il publie également une histoire pour enfants dans une revue de jeunes.
L’influence familiale n’est pas étrangère aux dispositions musicales dont fait preuve le jeune Carl.
En effet, il déchiffre régulièrement des œuvres symphoniques ou des opéras en compagnie de sa mère. Il n’est d’ailleurs pas rare de croiser dans la famille Orff des musiciens interprétant de la musique de chambre.
À partir de 1909, suite à une représentation du : « Fliegenden Holländer » de Richard Wagner, il assiste régulièrement à des Opéras ainsi que des pièces de théâtre.
Sa première publication musicale : « Eliland-Liedern » date de 1911, œuvre à laquelle s’ajoutera une autre en trois parties pour chœur et baryton solo sur le thème de : « Also sprach Zarathustra (1912) ».
Carl Orff fréquente « l’Akademie der Tonkust » mais les relations avec ses professeurs ne sont pas satisfaisantes, il se sent musicalement incompris.
Ses premières compositions seront influencées par Schoenberg et Debussy (« Gesei, das Opfer »)
Durant plusieurs années il assurera la fonction de répétiteur à Munich, Manheim puis Darmstadt. Cette période sera momentanément interrompue par l’appel sous les drapeaux (1917).
Carl Orff est de plus en plus attiré par le théâtre, notamment par les œuvres de Shakespeare, mais également par la tragédie Grecque antique. Il est « Fortement influencé par le caractère magique, rituel, incantatoire des musiques dites primitives et par la richesse des musiques archaïques des grandes civilisations »1
De retour à Munich, il se voue à la composition ainsi qu’à l’analyse d’œuvres du 16° et 17° siècle. Il travaille à l’adaptation de : « L’Orfeo » de Monteverdi pour le théâtre moderne.
A cette époque, l’expressionnisme Allemand est très actif. Carl Orff, sans en être le chef de file, y prend malgré tout une part importante. Les idées de Jaques Dalcroze à propos de la danse et du mouvement trouvent un écho très favorable dans les milieux artistiques. L’expression par le corps devient plus naturelle, moins rigide que celle imposée par la rigueur du classique.
En 1923, Orff rencontre à Munich Dorothée Günther, une artiste peintre qui participe à la mise en scène de « L’Orfeo » et dont il partagera la vie quelques années.
Dorothée Günther qui a suivi de près les travaux de Dalcroze et de Laban envisage de créer une école dans laquelle des jeunes de tous les milieux pourraient s’initier à la gymnastique, la danse rythmique et la danse d’expression.
Carl Orff s’enthousiasme pour ce projet novateur et propose d’apporter un volet musical à l’enseignement du mouvement. Ces deux disciplines deviennent alors interactives dans un enrichissement mutuel.
En 1924, l’école Günther initie ses activités à Munich dans un pavillon toujours visible aujourd’hui, dans lequel se déroulent les activités du « Orff Zentrum ». C’est en ce lieu que va naître le concept de : « Musique élémentaire ». Dans cette nouvelle pédagogie, une place centrale est accordée au travail de groupe, au mouvement, au rythme ainsi qu’à l’improvisation.
Les années 1924/1925 voient l’arrivée à l’école Günther de Maja Lex et Gunhild Keetman.
Maja Lex, d’abord étudiante, prendra ensuite la direction de la formation corporelle de l’école.
Gunhild Keetman, également étudiante au début, assumera la tâche d’approfondir la technique instrumentale et d’écrire les premières pièces. Ainsi que nous venons de le voir, cette pédagogie de la musique et du mouvement n’est pas l’œuvre d’un seul homme mais d’une équipe.
En 1934, dans le cadre des jeux olympiques, il est demandé à Orff de composer la musique du défilé des enfants. Cette pièce qu’il composera en collaboration avec Keetman et Lex aura pour titre « Parade et ronde des enfants et des jeunes filles » et connaîtra par la suite un succès insoupçonné à l’époque.
Pour des raisons politiques, l’école Günther cesse ses activités en 1937. Orff, Lex, Keetman et Günther se perdent de vue.
La même année Carl Orff présente un opéra en 3 actes intitulé : « Carmina Burana ». De ses œuvres, celle-ci restera la plus connue. Il est à noter qu’à ce moment il détruira une grande partie de ses œuvres antérieures.
D’autres œuvres suivront, notamment pour le théâtre, comme « La lune, un petit théâtre du monde », « L’astucieuse », « Songes d’une nuit d’été », « La bernauerine, une pièce bavaroise », « Astutuli », « Antigonae » etc..
Sa participation à la partie musicale des jeux olympiques de Berlin et les représentations données durant ces années troublées lui vaudront par la suite de la méfiance voire de l’hostilité, surtout à l’étranger.
Probablement son erreur aura été de demeurer uniquement dans un rôle de compositeur et de ne pas prendre une position plus tranchée face au régime totalitaire de l’époque. Néanmoins en étudiant de plus près le livret de « Carmina Burana » on remarque des textes qu’il fallait oser présenter en pleine période fasciste :
« Sur le siège de la Fortune,
j’étais assis en haut,
des fleurs bariolées de la prospérité
couronné ;
mais tout prospère que je fus,
choyé et béni,
du sommet alors je chus,
dépouillé de la gloire.
La roue de la Fortune a tourné ;
je descends, déchu ;
un autre est porté vers le haut ;
démesurément exalté,
le roi siège au faîte-
qu’il prenne garde de tomber!
car sous l’axe nous lisons :
Hécube reine. »2
En 1948, La radio bavaroise découvre l’enregistrement de la « Parade et ronde des enfants et des jeunes filles ». Anne-Marie Schrambeck alors directrice de la radio scolaire demande à Carl Orff de composer de nouvelles pièces que les enfants pourraient interpréter eux mêmes. Orff occupé à l’écriture d’Antigone accepte néanmoins le défi d’autant que l’expérience de l’école Günther s’était interrompue prématurément.
Les émissions qu’il anime en compagnie de Gunhild Keetman, conçus sous forme d’exemples à reproduire puis à développer, rencontrent un succès qui dépasse toutes les espérances.
En compagnie des luthiers : Klaus Becker, et Karl Maendler, Carl Orff met au point toute une série de petits instruments à percussion, xylophones et métallophones. En 1949 ils créent le « studio 49 » qui sera voué exclusivement à la fabrication de ce qui deviendra : « l’instrumentarium ORFF »
Le « Schulwerk » (l’atelier scolaire) de Orff et Keetman durera deux ans et demi Il donnera naissance à une œuvre devenue célèbre : « Histoire de la nativité » ainsi que cinq volumes intitulés : « Musique pour enfants ».
L’intérêt pour le « Orff-Schulwerk » dépasse à présent les frontières. L’université de musique de Salzbourg (le Mozarteum) propose à Gunhild Keetman d’ouvrir une classe de musique élémentaire.
En 1960, le gouvernement Autrichien débloque des fonds afin que le Mozarteum puisse ouvrir des annexes en dehors de la ville. Celles-ci seront exclusivement réservées à l’enseignement de la pédagogie musicale Orff. L’institut Orff verra le jour en 1963 dans ces locaux, les mêmes qu’il occupe encore aujourd’hui. Carl Orff et Gunhild Keetman en assumeront la direction jusqu’en 1970.
Entre 1950 et 1973, Carl Orff fera paraître de nombreuses œuvres comme : « Trionfi », Comédie sur la résurrection du Christ », Oedipus der Tyran », Ludus de nato », « Prometheus », « Comédie sur la fin du temps ».
En 1973 il travaille à série documentaire intitulée « Carl Orff und sein werk ».
Carl ORFF était un ami de Jacques Prévert ainsi qu’un admirateur de la tradition musicale populaire Française.
Considéré par beaucoup comme le plus grand dramaturge théâtral et musical après Wagner, il s’éteindra le 23 Mars 1982 à Munich.