Charles Edward Ives(Danbury, Connecticut, 1874-1954)
Après avoir appris la composition à l'université Yale, il abandonne le métier de compositeur au début du XX° siècle pour fonder une compagnie d’assurances qui devient prospère. Il continue cependant à composer de la musique sans la faire publier ni jouer. À partir des années vingt des problèmes de santé l'obligent à arrêter ses activités professionnelles et artistiques. L’avant-garde musicale de New York commence alors à faire jouer sa musique. Certaines œuvres d'envergure comme sa quatrième symphonie ne sont pourtant jouées que bien après sa mort. La musique de Charles Ives est originale, tant par ses techniques avant-gardistes que par les emprunts à la musique populaire.
Son père, George Ives, était chef de la musique de l'artillerie de l'union dans l'armée des États-Unis durant la guerre de Sécession. Il suivit les cours d'Horatio Parker à l'Université Yale en 1894. Il y composa plusieurs pièces dans le style choral de son professeur. Il fit des expérimentations musicales qu'il poussa assez loin. Apès avoir obtenu son diplôme à Yale, il accepta un travail modeste dans une compagnie d'assurance à New York. Il sera organiste à l'église jusqu'en 1906. Il changea d’employeur et finit par fonder avec son ami Julian W. Myrick sa propre compagnie d'assurance tout en continuant à composer beaucoup. Il a été sujet à des attaques cardiaques.Ives publia en 1922 ses 114 Songs qui donnent la mesure de son travail de compositeur. En 1927, il eut l’impression de ne plus pouvoir rien composer : « nothing sounds right » (plus rien ne sonne comme il faut). Il entre alors dans une période siencieuse comparable à celle de Jean Sibelius
Sa première symphonie montre qu’il est passé maître à écrite en forme sonate : il reprend les formes de son époue mais a aussi une tendance iconoclaste puisque le deuxième thème montre plusieurs directions harmoniques différentes. Tout comme Hector Berlioz, Ives était fasciné pour les musiques d'extérieur et par leur instrumentation. Ses tentatives de fusionner ces deux éléments et son admiration pour Beethoven sont les fils conducteurs de sa musique.
The Unanswered Question (1906 révisé en 1930-35), pour trompette soliste, quatre flûtes, et quatuor à cordes, est caractéristique de son style. Les cordes hors scène jouent très lentement tandis que la trompette seule face au public joue différents motifs très courts qu’Ives décrit comme « l'éternelle question de l'existence ». Les flûtes sur scène répondent à la trompette par une explosion stridente, sauf la toute dernière fois : c'est la question sans réponse (the unanswered question). La pièce juxtapose des éléments variés et disparates, conduits par la trame d'une histoire dont nous n'avons jamais réellement conscience, ce qui rend la pièce formidablement mystérieuse.
Sa Sonate pour piano n° 2 « Concord, Mass » (1909-1915), est probablement sa pièce pour piano solo la plus célèbre. C'est une pièce au rythme et à l’harmonie aventureuses qui démontre son attachement à la 5° symphonie de Beethoven dont il cite le thème à plusieurs reprises. C’est aussi un des exemples les plus frappants de son expérimentation : dans le second mouvement, il demande au pianiste d'utiliser une pièce en bois de 14 pouces ¾ (37.5 cm) pour créer un « cluster chord », c’est-à-dire un accord de touches noires ou blanches consécutives sur la longueur de cette pièce. La sonate Concord marque la profonde influence qu'ont eu les écrivains transcendantalistes sur sa musique. Chaque mouvement porte le nom d'un des quatre plus importants membre de ce groupe : Ralph Waldo Emerson, Nathaniel Hawthorne, Bronson Alcott et Henry David Thoreau.
Le Quatuor à cordes n° 2 atteint des sommets d'écriture contrapuntique : pointes dissonantes aiguës (mouvement Arguments) et lenteur transcendantale. Ce recours aux extrêmes est fréquente dans la musique de Ives qui juxtapose des résonances dissonantes contrastée et des calmes lyriques. Le langage d’Ives, tout comme celui de Mahler, utilise beaucoup de lignes mélodiques indépendantes.
Henry Cowell et Elliott Carter furent parmi les premiers défenseurs de sa musique.